Deseret News
Publié : dimanche 15 janvier 2012 19:00 HNR
David Letterman sait comment faire rire. Comme la plupart des comiques, il se jette sur les nouvelles du jour, se positionne impassiblement devant la caméra et s’exprime avec audace sur le sujet. « Oh, avez-vous entendu parler de ça? » a demandé l’animateur de CBS, du Late Show avec David Letterman, à son public récemment. « Un membre du personnel de la campagne de Newt Gingrich a été congédié parce qu’il faisait des commentaires négatifs au sujet des Mormons. J’ai pensé alors – attendez une minute – est-ce que Newt n’est pas pour le fait d’avoir plusieurs épouses ? ». Des rires ont retenti dans le public suivis par des applaudissements. Le sujet de la polygamie est une chute habituelle quand il s’agit de se moquer des Mormons – comme si les Mormons et la polygamie étaient des synonymes dans les médias. Ironie du sort, la pratique qui est la plus associée aux Mormons est une pratique à laquelle la plupart des Mormons s’opposent, selon une nouvelle étude sur les Mormons aux États-Unis, publiée jeudi par le Forum du Pew Research Center, au sujet de la religion et la vie publique. (N.D.T. : Le Pew Research Center effectue des sondages d’opinion publique aux USA).
Selon cette étude, les membres de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours rejettent sans équivoque la polygamie – seulement 2 pour cent ont déclaré que cette pratique est moralement acceptable – preuve d’un gouffre béant entre ce que les Mormons croient et comment ils sont perçus. L’étude montre que les opinions des Mormons sont majoritairement conservatrices mais que leurs points de vue sont, à bien des égards, également surprenants – surtout quand il s’agit de leurs points de vue sur des questions d’ordre moral, le divorce, l’homosexualité et la polygamie.
Morale
Les Mormons prennent aussi position de manière significative sur les questions d’ordre moral dans d’autres domaines, telles que le divorce, les relations sexuelles en dehors des liens du mariage et la consommation d’alcool.
Bien que les enseignements de l’Eglise des SDJ soulignent l’importance et la nature éternelle de la famille, seulement 25 pour cent des Mormons interrogés ont déclaré que le divorce est moralement répréhensible, selon l’étude. Cela signifie que les Mormons sont un peu moins moralement opposés au divorce que le grand public.
« Pour les catholiques, le divorce n’existe pas. Ils pensent que ce n’est pas seulement mal, mais que c’est impossible », a déclaré Matthew Bowman, membre d’une commission consultative d’experts pour le Pew Research Center sur cette étude et auteur de « Les Mormons », un livre sur l’histoire de l’Eglise des SDJ. « Cela n’est pas le cas pour les Mormons. Théologiquement, le divorce est possible dans le Mormonisme. Cela n’est pas souhaitable, mais les Mormons reconnaissent qu’il est parfois nécessaire et que c’est parfois la bonne chose à faire ».
D’autres points de vue sur la morale, révélés dans l’enquête, caractérisent les Mormons, dit Bowman – 54 pour cent ont déclaré que la consommation d’alcool était moralement répréhensible, comparé à 15 pour cent dans la population générale. L’hypothèse, chez les non-mormons, est que si les Mormons pensent que boire de l’alcool est mal, alors ils doivent penser que tous ceux qui consomment de l’alcool sont remplis de vices moraux. Cette idée peut rendre les gens méfiants sur les Mormons et faire penser qu’ils ont une sorte d’attitude élitiste, dit-il.
Les différences sur les points de vue moraux peuvent engendrer un obstacle à l’acceptation des Mormons – non seulement dans les scènes sociales de grande envergure, telles que l’élection présidentielle, mais aussi dans les collectivités.
« Ce que vous trouverez tout au long du rapport est une tension » a déclaré David Campbell, professeur adjoint à Notre-Dame et l’un des conseillers ayant travaillé sur l’étude. « Les Mormons aiment utiliser l’expression : « Soyez dans le monde, mais pas du monde ». Ils vivent, de toute évidence, leur vie dans le monde. Ils sont actifs et impliqués dans leurs collectivités, mais ils ont ces croyances et pratiques qui les distinguent un peu, et parfois il peut y avoir conflit entre les deux ».
Homosexualité
Les Mormons ont des opinions plutôt très conservatrices lorsqu’il s’agit de l’homosexualité. Le sondage demandait aux Mormons si l’homosexualité devrait être acceptée par la société ou découragée par la société, avec une option pour : aucun des deux, les deux, ou « ne sait pas ». La réponse – 26 pour cent ont dit que l’homosexualité devrait être acceptée, 65 pour cent ont dit qu’elle devrait être découragée – a placé les Mormons comme les moins d’accord pour dire que l’homosexualité devrait être acceptée par la société. Mais un taux d’acceptation de 26 pour cent, c’est-à-dire environ 1 Mormon sur 4 qui disent que l’homosexualité devrait être acceptée, pourrait être un chiffre étonnamment élevé pour certains.
Un intérêt particulier doit être apporté au fait que seulement 8 pour cent des Mormons interrogés se sont identifiés comme des libéraux, et 66 pour cent ont dit qu’ils étaient des conservateurs. Cela signifie que certains de ceux qui ont dit que l’homosexualité devrait être acceptée s’identifient aussi comme politiquement conservateurs, dit Bowman. Cette distinction illustre la complexité de l’opinion des Mormons sur la sexualité – c’est-à-dire qu’elle est enracinée plus dans les préceptes religieux que dans les opinions politiques. Pourtant, il est difficile de tirer une conclusion sur les points de vue des Mormons en ce qui concerne l’homosexualité, si on se base sur cette étude, dit Terryl Givens, conseiller au Pew Research Center et professeur de littérature et de religion à l’Université de Richmond.
« Les résultats doivent être considérés avec prudence », dit Givens. « Les déclarations officielles des SDJ insistent qu’il y a une distinction entre l’orientation (sexuelle) et le comportement (sexuel), mais l’enquête n’a pas fait la différence entre les deux, entraînant probablement de nombreux Mormons à ne pas savoir comment répondre à cette question. Il est néanmoins clair que les Mormons tendent vers une plus grande acceptation des relations entre personnes du même sexe, tout comme le fait la société dans son ensemble, mais à un pourcentage beaucoup plus faible ».
Polygamie
Pendant un moment, il y a 120 ans, certains mormons pratiquaient le mariage plural, c’est pourquoi on a associé les Mormons à la polygamie. La pratique a été stoppée en 1890, mais cette association persiste dans la culture populaire, peut-être, en partie, parce que les Mormons sont parfois confondus avec les membres de l’Eglise fondamentaliste des SDJ, un groupe polygame qui n’est pas affilié à l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours.
Dans l’étude d’octobre-novembre 2011 d’un échantillon national de 1’019 mormons, 86 pour cent ont déclaré que la polygamie est moralement répréhensible. C’est un nombre qui surprend Bowman.
S’il n’y avait pas de confusion entourant les Mormons et la pratique du mariage plural de l’Église FSDJ, Bowman dit que cette statistique pourrait ne pas être aussi élevées.
« Selon mon expérience, les Mormons ont une relation tendue avec la polygamie, » a commenté Bowman au sujet des résultats de l’étude. « Il y a un sentiment de rejet de la polygamie qui identifie un membre de l’Eglise des SDJ et le distingue des fondamentalistes. C’est un indicateur culturel autant qu’un énoncé théologique. «
Certains de ceux qui ont répondu au sondage, 11 pour cent, ont déclaré que la polygamie n’est pas une question d’ordre moral.
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