par Michael Ulrich

Cet article a été élaboré à partir d’un discours que j’ai prononcé lors d’une réunion de Sainte-Cène ; je souhaite collecter ici quelques réflexions sur l’œuvre pour les morts.

Introduction

famille-mormone-jeune2Lorsque le Seigneur délivra Israël de la servitude en Égypte, il lui donna aussi des commandements et des lois pour l’aider à se rapprocher de Lui, pour se souvenir de Son amour et se dépouiller de leur égoïsme. Parmi ces lois, figure ce que nous appelons les Dix Commandements, ou encore le Décalogue.

Parmi ces dix commandements, un seul a été accompagné d’une promesse pour ceux qui décident d’y obéir : « Honore ton père et ta mère afin que tes jours se prolongent dans le pays que l’Éternel, ton Dieu, te donne ». [1]

Il y a certainement beaucoup de raisons qui devraient nous pousser à honorer nos parents, quelque soit notre religion, ou notre absence de religion. Nos parents ont vécu depuis plus longtemps et en tant que tel ont plus d’expérience. En hébreu, la racine qui signifie « honorer » se dit « kavod » et elle a également le sens de « donner du poids » : donner du poids aux enseignements, aux leçons, aux conseils de nos aînés.

Il y a sans doute encore d’autres raisons, mais j’aimerai dans cet article me focaliser sur une raison bien particulière. En hébreu, les termes père (« av ») et mère (« em ») ne désignent pas seulement le père et la mère d’un homme mais également tout ancêtre de sexe respectivement masculin et féminin, ses pères et ses mères au sens large. En gardant ce sens à l’esprit, j’ai été frappé par la ressemblance entre ce passage d’écriture et un autre que nous trouvons dans Malachie 4 :5-6 :

Voici, je vous enverrai Élie, le prophète, Avant que le jour de l’Éternel arrive, Ce jour grand et redoutable.
Il ramènera le cœur des pères à leurs enfants, Et le cœur des enfants à leurs pères, De peur que je ne vienne frapper le pays d’interdit.

Les deux promesses sont très semblables à ceci près que l’une est positive (« que tes jours se prolongent dans le pays que l’Eternel, ton Dieu, te donne. ») alors que l’autre est négative (« De peur que je ne vienne frapper le pays d’interdit. »). Le prophète Joseph Smith a enseigné que ce passage de Malachie se rapporte à l’œuvre pour les morts.

La Rédemption des morts

Tant d’hommes ont vécu sur cette terre sans avoir eu l’occasion de connaitre l’Évangile, soit parce qu’ils vivaient à une époque où l’Évangile n’était pas sur terre dans sa plénitude, soit parce qu’ils vivaient dans des régions du monde où l’Évangile n’avait pu être prêché. Toutes ces personnes n’ont pas eu l’occasion de faire preuve de foi envers le Christ, n’ont pas eu l’occasion de recevoir les ordonnances de l’Evangile tels que le baptême. Qu’advient-il d’eux ? Beaucoup de personnes du monde chrétien ont tenté de répondre à cette question. Il y a eu globalement deux types de réponse :

1) Ces personnes ne pourraient être sauvées. Mais ce seraient penser que Dieu est un Dieu injuste, faisant acception de personnes, décidant de sauver les uns et de damner les autres de manière arbitraire. Il est contraire à la logique, à la raison et à tous les sentiments nobles et élevés que nous puissions avoir que de penser qu’il en est ainsi.

A ce sujet, il est une anecdote intéressante. A la fin du VIIème siècle, Pépin de Herstal, grand-père de Pépin le Bref et arrière grand-père de Charlemagne, fit prisonnier Radbod roi de Frise lors d’une opération militaire. Les Frisons étaient encore païens à cette époque et Pépin leur proposa le baptême. Mais lorsque Radbod apprit que ses ancêtres, qui n’avaient pas été baptisés, ne pourraient pas être sauvés, il a dit préférer être damné avec eux, plutôt que d’être sauvé avec un petit nombre qu’il ne connait ni d’Adam ni d’Eve…

Non seulement cette pensée est contraire à la raison, mais elle contredit aussi ce que les Écritures nous apprennent de la personnalité de Dieu. Moïse 1 :39 nous dit que l’œuvre et la gloire du Seigneur sont de « réaliser l’immortalité et la vie éternelle de l’homme ». Pourquoi renoncerait-il à sa gloire sur une base arbitraire ? Nous apprenons aussi que nous sommes enfants de Dieu. Un père terrestre aime ses enfants et désire leur bonheur. Comment pourrait-il en être autrement d’un Père parfait ?

2) Le baptême ne serait pas nécessaire. Pourtant le Seigneur a enseigné à Nicodème dans Jean 3:5 que personne ne peut entrer dans le royaume des Cieux s’il ne « nait d’eau et de l’esprit », faisant référence au baptême et à la confirmation, ou don du Saint-Esprit. Ainsi les Écritures enseignent clairement que le Seigneur n’a pas rendu facultatif le baptême, ordonnance à laquelle lui-même s’était soumis à l’époque où il fut sur terre, lui qui est sans péché. Il serait d’ailleurs illogique que le Seigneur institue une ordonnance facultative et qu’il permette à l’un d’être sauvé d’une façon et à l’autre d’une autre. Lorsque nous disons que le Seigneur ne fait pas acception de personnes, cela signifie qu’il juge un homme comme un autre, selon leurs actes et les désirs de leur cœur, et non de manière arbitraire.

Aucune de ces deux solutions n’est convenable. L’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours proclame que le Seigneur, dans sa miséricorde et son amour infini pour le genre humain, a prévu un moyen pour que chaque homme ait une occasion de connaitre et d’accepter l’Évangile et de recevoir les ordonnances salvatrices.

CU050817-004HRLorsqu’un homme meurt, son esprit se sépare de son corps, et le premier se rend dans un lieu appelé le « monde des esprits ». Là, les esprits des hommes qui ont reçu l’Évangile dans la vie mortelle, continuent leur œuvre en enseignant à ceux qui n’ont pas eu cette opportunité. Cependant, les ordonnances telles que le baptême ou les ordonnances du Temple ne peuvent être accomplies dans cet état « post-mortel ». En effet, il est facile de concevoir qu’il est indispensable de posséder un corps de chair et d’os pour pouvoir être baptisé. C’est pourquoi, les vivants accomplissent cette œuvre à leur place, un homme se faisant baptiser à leur faveur.

Il m’est arrivé dans ma vie de Saint des derniers jours d’entendre toute sorte d’idées fausses et saugrenues sur l’Église. Quelqu’un m’a une fois demandé : « Vous déterrez les morts pour les baptiser ? ». Je tiens à préciser à ceux qui penseraient quelque chose de ce genre, qu’il n’y a rien de plus faux. Il s’agit d’un membre vivant de l’Église qui se fait baptiser à la place de la personne en faveur de qui on effectue l’ordonnance.

Zacharie 9:11 résume parfaitement les caractéristiques de cette œuvre :

Et pour toi, à cause du sang de ton alliance, j’ai relâché tes prisonniers de la fosse où il n’y a point d’eau.

La fosse désigne dans le langage de l’Ancien Testament le monde des esprits, et plus particulièrement ce que nous avons coutume d’appeler la prison des esprits, le lieu où se trouve ceux qui ont rejeté l’Évangile du Seigneur et ceux qui ne l’ont pas connu. Lorsque ces derniers acceptent les ordonnances faites en leur faveur, ils peuvent rejoindre le paradis, c’est-à-dire le lieu où se trouvent les esprits des justes.

Il n’y a pas d’eau dans cette fosse et c’est pourquoi le baptême n’y peut être accompli. Quant au sang de l’alliance, il fait référence au sacrifice expiatoire de Jésus-Christ, car sans lui rien ne peut être fait. C’est uniquement son Expiation qui donne de la puissance aux ordonnances et qui permet aux hommes d’obtenir leur salut. J’aime beaucoup cette Écriture, qui résume parfaitement ces points et l’exprime dans un très beau langage.

Une autre écriture parle de la rédemption des morts en des termes très semblable. 2 Néphi 8:14 nous dit :

Bientôt celui qui est courbé sous les fers sera délivré ; il ne mourra pas dans la fosse, et son pain ne lui manquera pas. [2]

Le séjour dans la prison des esprits est décrit comme un état de servitude, « courbé sous les fers », car ces esprits ne peuvent pas vivre avec leurs familles. Les ordonnances comme le mariage au Temple, qui permettent aux couples d’être unis non seulement pour le temps mais pour toute l’éternité, n’ont en effet pas encore pu être accompli pour ces personnes.

La gratitude

Comme nous devons accomplir ces ordonnances pour les morts, les membres de l’Église recherchent activement leurs ancêtres pour pouvoir effectuer, dans un des temples de l’Église, tout ce qui est nécessaire pour leurs prédécesseurs. Cela explique la passion qu’ont les membres pour la généalogie.

temple-mormon-croyancesMalachie a prophétisé que si nous ne le faisions pas, la terre serait frappée d’interdit. Je pense qu’une des raisons pour lesquels le Seigneur est si sévère dans ce domaine est qu’il serait faire preuve d’ingratitude de ne pas aider nos ancêtres en accomplissant pour eux ce qu’ils ne peuvent faire pour eux-mêmes. Ce que nous sommes est en grande partie dû à l’héritage de nos ancêtres. Beaucoup d’entre eux ont agi au mieux de la lumière spirituelle et de la connaissance qui leur était disponible et certainement beaucoup auraient accepté l’Évangile. J’aimerais citer mon cas. Certains de mes ancêtres, ceux qui m’ont transmis mon nom de famille, étaient Anabaptistes-Mennonites. Il s’agit d’un courant religieux chrétien qui s’était formé en réaction à certains excès des religions d’état et qui prônait le baptême d’adulte uniquement – par opposition au baptême d’enfants -, afin qu’il s’agisse d’une vraie démonstration d’engagement, et la séparation stricte de l’état et de la religion. Je suis fier de leur héritage. Ils ont dû quitter leur patrie bernoise afin de fuir les persécutions dont ils étaient les victimes. Ils n’ont pas hésité à rester fermes dans leurs convictions, quoi que cela leur coûte. Si nous sommes redevables de ce que nous sommes à nos ancêtres, ne serait-ce pas une horrible ingratitude que de ne pas les aider comme nous le pouvons ? Or, il me semble que l’ingratitude est l’un des pires péchés. Il s’agit d’une forme extrême d’égoïsme. Ne serait-ce pas honorer nos pères et nos mères que de les aider ?

La Récompense

L’œuvre pour les morts a ceci de merveilleux qu’elle est entièrement désintéressée. Nous n’avons aucun gain, aucune récompense à espérer. La seule récompense que nous obtenons est de nous dépouiller de notre égoïsme et de parfaire notre altruisme et notre amour chrétien.

Abdias 1:21 enseigne que « des libérateurs monteront sur la montagne de Sion ». La montagne de Sion est souvent dans les Écritures une métaphore désignant le temple. En contribuant au salut de nos aînés, nous effectuons une œuvre similaire à celle du Christ. Ce dernier a souffert sur la Croix et dans le jardin de Gethsémané pour porter à notre place nos péchés, afin que si nous nous repentions, nous soyons lavés de tous ces péchés. Il a donc effectué une œuvre par procuration, c’est-à-dire qu’il a fait pour quelqu’un ce que ce quelqu’un ne pouvait faire pour lui-même.

C’est pour cela que Joseph Smith a enseigné que nos ancêtres ne peuvent être rendus parfaits sans nous, ni nous sans eux. En effet, ils ont besoin de nous pour accomplir les ordonnances du salut en leur faveur. Mais nous, nous avons aussi besoin de cette œuvre pour nous aider à nous débarrasser de notre égoïsme et nous rapprocher du Seigneur en effectuant une œuvre aussi similaire à la sienne.

Conclusion

J’aimerais terminer en exprimant ma reconnaissance au Seigneur pour son Évangile. Dans sa prévoyance et son amour, il a prévu un moyen pour que tous puissent revenir en sa présence. Cela ne dépend que de nous, que de notre acceptation de la main qu’il nous tend.

Notes et commentaires

[1] Exode 20:12, La Bible.
[2] Caractères gras rajoutés.

 

photo IDMichaël Ulrich est membre de l’Eglise de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours depuis maintenant presque sept ans. Il a servi en tant que missionnaire de l’Eglise en Allemagne. Il suit des études de Mathématiques à l’Ecole Normale Supérieure.

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